Mon métro…nome moscovite

Mon métro…nome moscovite

Inauguré en 1935 et qualifié à juste titre de palais souterrain, le métro moscovite est un incontournable dans tout séjour touristique qui se respecte. A vous lustres, stucs, marbres, vitraux et statues!

Il demeure le moyen de transport le plus rapide et le plus fiable pour se déplacer dans la ville: 7 millions de personnes l’empruntent chaque jour. Fiable car la grève n’est ici qu’un concept abstrait et les incidents techniques ne semblent pouvoir élire domicile à 40 mètres de profondeur.

N’ayant pas un goût prononcé pour la course automobile, je l’ai rapidement élu comme mon moyen de transport favori. Une fois le M rouge repéré et munie d’un ticket, vous êtes alors prête à vous lancer dans ce que j’appelle une fourmilière – à un détail d’importance près -vous n’êtes pas reine en ce royaume.

Les reines trônent dans deux petites cabines en verre: en haut et en bas de l’escalator, et veillent scrupuleusement à ce que chacun et chacune respectent les règles imposées.

A vous l’exploration des profondeurs ! La première règle qui s’impose est de se mettre sur le côté droit de l’escalier. Les premières fois, on s’agrippe à la rampe devenue notre planche de salut. Le métro se situe à 40 mètres de profondeur, inutile donc de scruter la ligne d’arrivée. Cette descente permet avant tout de réunir toutes ses forces pour le grand saut : l’arrivée sur les quais !

Deux rives s’offrent à vous, la droite ou la gauche en fonction de votre destination: inutile d’hésiter à ce moment au risque de vous faire bousculer, pour ne pas dire plaquer au sol. En heure de pointe les métros se succèdent: toutes les minutes, une bourrasque assourdissante vous annonce l’arrivée d’un train. Aucun brushing n’y résiste. Le train arrivé, les choses sérieuses commencent. Après avoir laissé descendre ceux qui le souhaitent (ou pas d’ailleurs), il vous faut faire preuve de fermeté pour être certaine de faire partie du voyage. Ici la galanterie n’est pas d’usage : c’est chacun pour soi ! Une voix masculine ou féminine annonce la prochaine station, suivie de la fermeture – brutale – des portes. Cette première petite victoire remportée, un décalé  « Chers passagers! » ( uvajaemye passajiry  pour les puristes qui me lisent) rappelle les règles de politesse impératives et… théoriques.

Hiver oblige, emmitouflée comme un bonhomme Michelin, il y fait chaud, on y transpire beaucoup et on savoure le fait d’avoir oublié de mettre du rimmel. A chaque fois, le nombre de personnes que peut contenir un wagon semble battre le record précédent. Au début, votre oreille aura du mal à se familiariser aux noms des stations : comptez les tout simplement pour identifier le lieu de votre libération.

Vous êtes en train de vous dire « Mais c’est l’enfer ! ». Oui, mais pas que …

Avec le temps, nos bonnes manières se rebellent: on défend sa place, on bombe même le torse, et on crie pour défendre l’existence de sa clavicule. Repérer le bon wagon pour sortir ou rejoindre une autre ligne nous donne l’impression de réduire les distances. On saute (presque) de joie en reconnaissant enfin à l’oreille le nom de la prochaine station. Plus sûre de soi, on découvre enfin la beauté d’un métro qui ressemble étrangement à une cathédrale.

Nos bouffées de chaleur se transforment en bouffées de bonheur grâce à un fou rire nerveux partagé, un sourire, une place cédée, une babouchka francophile qui engage la conversation, un da affirmé pour répondre à la fameuse question « Vous sortez ?! ». En tendant l’oreille, on revoit son mode de communication et on ose se dire que l’impératif est le temps qu’il faudra vite maîtriser en parlant russe. En ouvrant grand les yeux, on s’attendrit en découvrant que le hall ou les quais peuvent aussi être le point de départ des rendez-vous amoureux. On savoure d’être aux premières loges pour des défilés de mode colorés, on révise sa définition de la féminité. Quand on est à deux doigts de la crise de nerfs, on ose augmenter le volume de ses écouteurs pour mettre ce spectacle vivant en musique. Et couvrir le bruit des rails qui semblent, eux aussi, ne plus supporter cette vitesse.

Petit à petit, on y trouve sa place, dans ce métro moscovite: même s’il nous fatigue souvent, il nous permet de sortir des sentiers plus que battus de notre quartier pour partir à la découverte de la ville au sens large. Et il est étonnamment celui qui m’a le plus souvent fait prendre conscience que je vivais bel et bien à Moscou.

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